Après la "Lune rouge" et la "Lune rose" depuis le 27 avril c'est la "Lune rousse"
   05/05/2025
Après la "Lune rouge" et la "Lune rose" depuis le 27 avril c'est la "Lune rousse"

Rouge, Rose ou Rousse ?...

Après la Pleine Lune de mars dite « Lune rouge » ou « Lune de sang » à cause du phénomène ’optique de diffusion et de dispersion de la lumière généré par une éclipse, et après la pleine Lune d’Avril appelée « Lune Rose » non pas à cause de sa couleur mais selon une coutume des Amérindiens de baptiser chaque Pleine Lune d’un qualificatif, cette fois lié à la période des fleurs notamment du plohx subulata, voici la Lune Rousse.  C’est pendant cette période que se situent les saints de glace. Leur influence est d’autant plus à craindre que leur fête coïncide aux périodes de la lunaison où l’influence de la lune se fait le plus sentir. S’il faut parler d’influence, c’est bien en effet de celle de la lune et non des braves saints qu’il faut parler.  Leur fête est essentiellement un moyen mnémotechnique qui date d’une époque ou le calendrier du facteur n’existait pas. 

En ces périodes, le soleil déjà haut et reste de plus en plus avec nous (+ 1H 30 en avril et + 1h22 en mai). Quand le ciel est dégagé, le thermomètre indique 19,20 ou 24° voir plus, dans la journée. Les petites pousses, les fruits en formation se gorgent de chaleur. Mais la terre met très longtemps à se réchauffer et elle ne peut pas restituer assez de chaleur la nuit.  Quand le soleil se couche, la fraicheur se fait ressentir, le froid se rétablit. Le thermomètre indique +4 ou + 5 degrés, plus ou moins mais pas nécessairement 0°.  Les petites pousses, les embryons de fruits subissent un choc thermique et prennent une apparence de roussi et deviennent noirs. C’est l’effet de « lune rousse ». 

« Lune rousse, vide bourse » ; « lune rousse, rien ne pousse » ; « Gelée de lune rousse de la vigne ruine la pousse » ; « Récolte n’est point assurée que la lune rousse soit passée ».

Voici à ce sujet une anecdote.

« Je suis charmé de vous voir réunis autour de moi, disait un jour Louis XVIII à une députation du Bureau des Longitudes qui était allée lui présenter la « Connaissance des temps et de l’annuaire », car vous allez m’expliquer ce que c’est que la lune rousse et son mode d’action sur les récoltes »

Le savant Laplace, qui conduisait cette délégation, resta sans réponse ; lui qui avait tout écrit sur la lune, n’avait en effet jamais songé à la lune rousse. Il consultait ses voisins du regard mais, ne voyant personne disposé à prendre la parole, il se détermina à répondre lui-même : « Sire, la lune rousse n’occupe aucune place dans les théories astronomiques ; nous ne sommes donc pas en mesure de satisfaire la curiosité de Votre Majesté. »

Le soir, pendant son jeu, le Roi s’égaya beaucoup de l’embarras dans lequel il avait mis les membres de son Bureau des Longitudes. Laplace l’apprit et vint demander à Arago s’il pouvait l’éclairer sur cette fameuse lune rousse. Arago alla aux informations auprès des jardiniers du Jardin des Plantes, et voici sa réponse publiée par Camille Flammarion dans « Astronomie populaire »

« Dans les nuits des mois d’avril et mai, la température de l’atmosphère n’est souvent que de 4, de 5 ou de 6 degrés centigrades au-dessus de zéro. Quand cela arrive, la température des plantes exposées à la lumière de la lune, c'est-à-dire à un ciel serein, peut descendre au-dessous de zéro, nonobstant l’indication du thermomètre. Si la lune, au contraire, ne brille pas, si le ciel est couvert, la température des plantes ne descend pas au-dessous de celle de l’atmosphère, il n’y aura pas de gelée, à moins que le thermomètre n’ait marqué zéro, pour d’autres raisons. Il est donc vrai, comme les jardiniers le prétendent, qu’avec des circonstances thermométriques toutes pareilles, une plante pourra être gelée ou ne l’être pas, suivant que la lune sera visible ou cachée par des nuages ; si les jardiniers se trompent, c’est seulement dans les conclusions : c’est en attribuant l’effet à la lumière de l’astre. La lumière lunaire n’est ici que l’indice d’une atmosphère sereine ; c’est par suite de la pureté du ciel que la congélation nocturne des plantes s’opère ; la lune n’y contribue aucunement ; qu’elle soit couchée ou sur l’horizon, le phénomène a également lieu. L’observation des jardiniers était incomplète, c’est à tort qu’on la supposait fausse. »

Les savants viennent ici au secours de la sagesse populaire qui avait fait les mêmes observations au point que ce phénomène se reproduisant nos Anciens ont écrit des dictons liés à la fête de ces saints qualifiés de « saint de glace ».  

Cette année avec les décalages de durée du calendrier lunaire avec notre calendrier grégorien, la lunaison de la « Lune Rousse » a lieu du 27 avril au 27 mai. Les premiers sont en dehors des dates de cette lunaison

Saint Georges le 23 avril ouvre le ban : « Pluie de saint Georges, coupe les cerises à la gorge ! » ou encore : » S’il pleut à la saint Georges, de cent cerises restent quatorze ». Et aussi : » S’il pleut à la saint Georgeau, n’y aura guignes ni bigarreaux ».

Vient ensuite Saint Marc le 25 avril : « s’il pleut le jour de la saint Marc, les guignes couvriront le parc » ; ou encore : « A la saint Marc s’il tombe de l’eau, il n’y aura pas de fruits à couteau ». C’est à dire de fruits dont on enlève la peau avec un couteau. Il faut ajouter à leur compagnie saint Philippe le 1er mai

« Marquet (Marc), Georget (Georges), et Philippet (Philippe), sont trois casseurs de Gobelets. » ou comme l’écrivait Rabelais « les saints gresleurs et gasteurs de bourgeons ». Le froid ou la grêle ces jours–là est néfaste pour la vigne, donc au vin, donc aux pichets et aux gobelets.  On dit encore :« Trois saints dont faut se méfier »

On ajoute à la liste Saint Robert le 29 avril, saint Eutrope le 30 avril.   

Saint Robert le 29 avril : « Gelée de saint Georges, saint Marc, saint Robert, récolte à l’envers ».

On dit aussi :     La pluie de saint Robert, du bon vin emplira ton verre.

Le 30 avril pour Saint Eutrope (ou Tropet) : saint Eutrope mouillé, Cerises estropiées.

« Les saints de glace » ne seraient, selon certaines interprétations, que les suivants, dont la fête à lieu pour la 2ème partie de la lunaison, et ils sont les plus redoutés, surtout comme si pour cette année leur fête est aux approches de la pleine lune de mai qui est le 12mai : « Mamert, Servais et Pancrace, voilà les trois saints de glace ». Ce sont les plus connus et les plus populaires « trois saints qui à eux seuls font un petit hiver ».

Pour couvrir toute la période de cette lunaison dont les dates varient, on trouve encore Saint Urbain, plutôt rassurant «   le paysan ne sera rassuré qu’après la saint Urbain passée »

Urbain peut être le pire des saints de glace au point que dans certains pays de vigne on le promenait quand il faisait beau et on lui « foutait le cul dans les orties » quand il gelait encore ! Nous devrions être tranquille à la fin de la lunaison avec la fête de l’Ascension, le 29 mai « à l’Ascension dernier frisson ».  

Addisias